Nicole Evelyne Mavré-Gigault, 73 ans en 2024, a choisi le soleil de Sugarland, Texas, USA, pour ses vieux jours. Dans sa propriété d’une valeur de près d’un million USD, la Congolaise d’origine française, dont la naissance en janvier 1951 avait été annoncée par télégramme dans les colonnes du Figaro, semble loin des affaires familiales. Elle continue cependant officiellement à exercer des mandats sur les sociétés de la famille et l’héritage de son père, Robert-Léon Mavré-Gigault et de sa mère, Simone Patard, fille de M. Patard, industriel à Savigny. 

Robert-Léon Mavré-Gigault (1921-2000) et Simone Patard étaient des pharmaciens et des colons français. 

En 1948, ils s’installent dans le Moyen-Congo, une colonie de l’Afrique équatoriale française où ils auraient ouvert la première pharmacie du pays. 

Les archives de l’AEF mentionnent un dépôt pharmacie par M. Touzelet Gilbert, gérant de la Compagnie française de l’Afrique occidentale (CFAO) à Dolisie le 13 février 1948, et la qualification de M. Dhenain François pour ouvrir une pharmacie à Pointe-Noire, Moyen-Congo le 4 mars 1948. En 1950, Simone Patard Mavré-Gigault vend sa pharmacie sise 138 boulevard Grenelle à Paris 15e à Madame Gaillard Suzanne, épouse Joubert Jean, pour un montant non précisé. Le 11 juillet 1953, les Mavré et Myriam Mollard née Le Bel, pharmacienne à Pointe-Noire, créent à Brazzaville, la Société Equatoriale Pharmaceutique (SEP), un grossiste répartiteur au capital de 600.000 FCFA de l’époque. Il s’agit encore du FCFA unique d’une valeur de 1 FCFA = 2 francs français, soit environ trois millions d’euros en 2023. On ne connait pas les noms des souscripteurs qui ont libéré intégralement les 600 actions de numéraires émises. 

Au terme de l’assemblée générale, Mme Myriam Mollard est nommée Présidente et Directrice générale. 

Dans la société coloniale du Moyen-Congo, M. Robert Mavré est un petit notable. En 1957, il est le Représentant titulaire des pharmaciens. En 1958 et 1959, expert pour la douane coloniale sur les produits pharmaceutiques.

En 1962, soit deux ans après l’indépendance, Mavré Robert, premier vice-président du Lions Club, est élevé au grade de chevalier de l’ordre du mérite congolais par le président Fulbert Youlou au côté de Babinet (Michel), assureur conseil, « Lions Club » Brazzaville ; Baujet (René), directeur de la Banque Centrale, membre du bureau du « Lions Club » à Brazzaville ; Normand (Jean-Charles), architecte, vice-président du « Lions Club » à Brazzaville et Trottier (André-René), directeur de la Banque Nationale pour le Commerce et l’Industrie à Brazzaville, membre du bureau du « Lions Club ». 

Le 10 mars 1965, l’arrêté n° 1011 sur l’autorisation d’officine accordée en 1956 à M. Mavré Robert est validé par le régime révolutionnaire du président Massamba Débat. Pascal Lissouba est premier ministre et Simon Gokana, [père de Denis Auguste Marie Gokana, patron de AOGC et conseiller hydrocarbures de Denis Sassou Nguesso], ministre de la santé publique, de la population et des affaires sociales. Il n’y a aucune trace d’autorisation d’officine à M. Mavré dans les journaux officiels de l’AEF de l’année 1956. En mai 1966, à l’étude de Maître Gnali-Gomes Marcel-Roger [père de l’avocat maître Vincent Gomes], notaire, M. Mavré vend pour un montant inconnu et à un acquéreur inconnu [peut-être la S.E.P] la pharmacie Mavré Morelle Rigal et Mavré Pharmaciens. Le colon a fait souche. 

Entre 1983 et 1996, la famille Mavré et ses associés ont créé un réseau d’entreprises au Congo, en France et en Suisse. Essentiellement des acquisitions de franchises d’hôtel et des SCI, puis une consolidation sous la forme de holding en Suisse. Cette structure particulière de l’Empire Mavré est caractéristique des montages financiers pour rapatriement et blanchiment de capitaux. Toutefois, sans accès aux documents financiers et bancaires, nous ne pouvons pas confirmer que c’est le cas ici. 

Ce que nous savons en revanche, c’est qu’en France, les sociétés ASOGI France et Holsi France affichent un chiffre d’affaires de zéro euros respectivement au minimum pour les quatre dernières années d’exercices. ASOGI France a des fonds propres de trois millions d’euros et HOLSI de deux millions d’euros. La holding Holsi est la plus ancienne, créée en 1996 en Suisse et actionnaire majoritaire de Holsi France.

Par un enchevêtrement d’associés et de sociétés, Holsi France gère le patrimoine français de la famille Mavré, dont l’hôtel de Gerland à Lyon, la SCI Brumi à la même adresse que l’hôtel Gerland à Lyon et DAMALINE – IBIS proche de Meaux –. Nicole Mavré-Gigault possède à Brazzaville la SCIP SIROCO, actionnaire en France de la SCI Brumi

246 rue Marcel Mérieux, 69007 LYON, ça ne s’invente pas, c’est donc l’adresse de la SCI Brumi et de l’hôtel de Gerland — chiffre d’affaires de neuf cent mille soixante-neuf euros en 2020 —, les principaux avoirs des Mavré. Marcel Mérieux, c’est le nom du père d’Alain Mérieux, les fondateurs des Laboratoires Mérieux, tristement célèbres pour l’affaire du sang contaminé.

La chronologie des créations des entreprises entre 1983 et 1996 s’inscrit parfaitement dans cette période. Principal grossiste répartiteur au Congo-Brazzaville, la Société équatoriale pharmaceutique SEP, aurait participé à l’écoulement en Afrique des stocks de sang français, comme nous en faisons l’hypothèse avec Laborex. 

Dès 1983, le professeur Luc Montagnier, avec les professeurs Françoise Barré-Sinoussi et Jean-Claude Chermann, avait identifié l’agent infectieux et la contamination par le sang. Après la décision de déremboursement par le ministre Laurent Fabius en 1985, les produits sanguins des laboratoires Mérieux, presque invendables en France, ont généré un immense bénéfice au Congo. Ce bénéfice aurait été blanchi par les Mavré à travers des investissements dans l’immobilier via les SCI et l’hôtellerie. En 1996, soit juste après l’alternance Mitterrand-Chirac, a été créée la holding en Suisse comme pour mettre les millions à l’abri d’injonctions à l’indemnisation de potentielles victimes. En 1996, les indemnisations des victimes françaises et de leurs familles étaient évaluées à 17 milliards de francs, soit 2,5 milliards d’euros. 

Autour de l’année 2018, le pharmacien titulaire de la pharmacie Mavré-SEP, feu Alex Ramel, fut aussi l’ambassadeur plénipotentiaire de l’Ordre de Malte en République du Congo. Son prédécesseur, Philippe d’Alverny, époux de Christiane Chodron de Courcel, cousine de Madame Bernadette Chirac, est administrateur de la société GROUPEMENT FORESTIER DE CONTRÔLE et de la SCI DE L’INSTITUT DE LA MAISON BOURBON. Son successeur, Henri Nsika, est professeur de français à Durham Public Schools, Greensboro, Caroline du Nord, USA. 

Malte est un hub financier pour les pétroliers congolais. Dans le scandale russo-congolais Gunvor, c’est via Malte que Asperbras versa 17,05 millions de dollars à Maxime Gandzion, fils de Prosper Gandzion, le ministre de l’éducation du gouvernement Youlou qui décora le père Mavré en 1957. 

Les Gandzion possèdent plusieurs propriétés à Miami, USA. Ils possèdent le 1000 BRICKELL PLZ 4703 Miami, FL d’une valeur de $552,500.00 et le 1100 S MIAMI AVE 2007, MIAMI, FL d’une valeur de $583,500. Le 1051 Northeast 89th Street Miami FL 33138 a été acheté pour 100 USD en 2018 au « Family Office des Gandzion », OMBIMA LLC, puis revendu pour 2 150 000 USD à J & L Land Investments LLC.

Quel rôle l’officier puis ambassadeur de l’ordre de Malte, dirigeant de la SEP, Alex Michel Ramel a-t-il joué pour permettre à Gandzion de recevoir les millions d’Asperbras ? 

À qui appartient réellement la société à laquelle les Gandzion ont revendu la propriété en Floride du Family Office ? 

Des questions pour le moment sans réponse.

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