Mercredi 22 Février 2023 – Andréa Ngombet, Collectif Sassoufit — Le néologisme est passé comme lettre à la poste lorsque le président Ali Bongo a parlé du Bassin du Congo-Ougoué ; c’est dire comment le lieu et le moment de ce raout françafricain n’a simplement aucun sens. Si on veut parler de forêt équatoriale en Afrique c’est à Brazzaville qu’il faut le faire. Ensuite, en pré-campagne d’élection présidentielle, cette visite du Président Macron vient donner un adoubement de facto au candidat sortant. Sur ce volet, Andrej Babis de Republique Tchèque pourrait en parler, le soutien de Paris n’a pas été d’un grand secours. Le One Forest Summit est un ovni, comme son promoteur en marche. Ni vraiment opération de greenwashing, ni vraiment une conférence inter-gouvernementale. C’est un tiers-lieu avec des sides-events selon le jargon de la start-up nation pour “phosphorer” une ambition collective du “preservatisme forestier”. Les droits humains ? Erreur 404 dit le moteur de recherche, cette page n’existe pas. Le droit des populations autochtones ? Sauver la planète on vous dit ! Et pour celà on réduit le bilan carbone en refusant l’accréditation à une journaliste comme Maria Malagardis de Libération. Le géopoliticien Bruno Tertrais dans une note de l’Institut Montaigne sur la Russie donnait une définition du Congo qui éclaire les ressorts coloniaux de la visite de Macron en Afrique centrale :
“un Extrême-Orient russe vidé de ses habitants pourrait devenir le Congo des années 2000 – un territoire non gouverné ouvert à toutes les prédations, la Russie devenant un « espace » plus qu’un « acteur ».” – Après la chute. Faut-il se préparer à l’éclatement de la Russie?, Bruno Tertrais
Pour Paris, le Bassin du Congo n’est qu’un espace et les pays qui le composent ne sont pas des acteurs. Les populations ? une gêne à la prédation des multinationales autant que pour les conglomérats Chinois, Turcs, Russes etc. L’absence d’une réprésentation de haut niveau de la Chine, première puissance déforestatrice du Bassin du Congo à ce sommet en révèle déjà l’inutilité pour la sauvegarde de la forêt et donc de la planète.
Les murmures du palais de l’Elysée disent que c’est pour “limiter l’hémorragie vers la Russie.” Diantre ! La médécine imaginaire de Molière soigne l’hémophilie diplomatique française à coups de saignées. En passant par Brazzaville, le Président Macron va céder au chantage d’une des plus vielles tyrannies au monde. En effet, dans une interview au Point le Président Denis Sassou Nguesso explique la présence de Wagner en RCA par le retrait français, il faut bien comprendre qu’il a adressé un ultimatum à Emmanuel Macron. Un stand by du Congo à Wagner vaut bien un passage à Brazzaville.
En réalité, cette visite de la honte n’y changera rien, pour célébrer les un an de l’agression de l’Ukraine par la Russie, le dauphin Denis Christel Sassou Nguesso se pavanait dans Brazzaville avec l’ambassadeur russe et exhibait un projet d’oeléduc qui traversera la forêt équatoriale. De ma fenêtre Paris a déjà perdu l’Afrique Centrale mais encore faut-il la perdre avec dignité !
Collectif Sassoufit 