Par Frédérique Prabonnaud
Depuis plusieurs années déjà, le Congo-Brazzaville connaît des ruptures de stock d’ARV à répétition et qui peuvent durer des mois. S’ensuivent des situations dramatiques pour les personnes vivant avec le VIH et les associations qui les soutiennent.
L’armoire à pharmacie est bien là. Mais les étagères sont presque vides. La photo a été prise à l’hôpital de base Makélékélé à Brazzaville (la capitale). Elle aurait pu l’être dans bien d’autres centres de prise en charge du VIH du Congo. Car dans ce pays d’Afrique centrale, les ruptures de stock d’antirétroviraux (ARV) sont devenues une habitude. « La situation est dramatique ! » résume le Dr Diane Alexia Fila, d’Avenir positif, une association créée en 2007, à Pointe Noire, par des parents d’enfants vivant avec le VIH. « Les malades sont abandonnés à eux-mêmes ; ceux qui ont la possibilité d’acheter achètent et les autres sont presque à six mois sans traitement », poursuit Fleur Tulsie Makosso, de l’Association serment universel (ASU).
Des engagements théoriques
Sur le papier, pourtant, le Congo-Brazzaville, pays à revenu intermédiaire, affiche une politique ambitieuse de lutte contre le VIH. Un décret de 2008 instaure la gratuité de la prise en charge des personnes vivant avec le VIH (dépistage, examens de suivi biologique et traitements). L’État congolais s’engage alors à financer les ARV pédiatriques et adultes. Par ailleurs, en 2011 est votée une loi de « lutte contre le VIH et le sida, et pour la protection des droits des personnes vivant avec le VIH ». Des engagements qui restent théoriques et qui ne masquent pas une réalité très différente. Compte tenu des quantités fournies insuffisantes, dès 2012 le Fonds mondial contre le VIH, la tuberculose et le paludisme a pris le relai du Congo pour les ARV pédiatriques. Mais la situation ne s’est pas améliorée pour autant en ce qui concerne les stocks d’ARV adultes. Depuis 2013-2014, le système de santé vit au rythme des ruptures d’approvisionnement. Une spécialiste du dossier explique ces ruptures par une « mauvaise gouvernance et la non-priorisation de l’allocation des budgets nationaux vers l’achat rationnel de médicaments ». Elle ajoute que « depuis 2015, les budgets prévus par l’État pour l’achat des ARV adultes n’ont pas été attribués à cet effet ». 2015, c’est aussi l’année où la centrale d’achat Comeg (Congolaise des médicaments essentiels et génériques) a été dissoute. La nouvelle centrale n’existe pour l’instant que sur le papier – une équipe technique assurant la gestion intérimaire – et fonctionne sans statut. Le pays subit des ruptures, partielles à totales, pour les ARV de 2e ligne, mais aussi pour ceux de 1re ligne, alors que la file active sous traitements était estimée à 23 000 adultes et plus de 1 500 enfants en mars 2017.
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Le Congo-Brazzaville en chiffres :
- 5 millions d’habitants
- 33 000 personnes sous ARV
- Espérance de vie à la naissance : 63 ans
- PIB : 7,8 milliards de dollars
- Dépenses de santé : 5,2% du PIB
Sources : Banque mondiale, Fonds mondial et OMS.
Carte : who.int/countries/cog/fr/