
Lettre ouverte à l’attention de Madame Christine LAGARDE
Directrice du Fonds Monétaire International
700 19th Street, N.W.
Washington, D.C. 20431,
États-Unis,
Madame,
C’est solennellement et avec une gravité sans précédent que nous, membres de la société civile congolaise, de l’extérieur comme de l’intérieur et affidés, avons, en cette période cruciale pour notre pays, choisi au travers de lettre ouverte de vous faire part des préoccupations qui sont les nôtres ainsi que celles du peuples congolais dont nous sommes les premiers ambassadeurs.
Le Congo Brazzaville comme vous le savez, fait face à une crise multidimensionnelle dont les premières victimes sont essentiellement des enfants.
Cette crise, qui touche toutes les strates de la société congolaise a dévoilé aux yeux du monde la perfidie d’un système politique mafieux centré sur des détournements colossaux de deniers publics et de fonds d’investissements internationaux tels que les vôtres.
Les Conseils d’administration de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI) ont approuvé respectivement le 26 et le 27 janvier 2010, le dossier de la République du Congo relatif à l’allègement de la dette au titre de l’initiative en faveur des Pays pauvres très endettés (PPTE).
La décision prise par les deux institutions a générer une épargne globale au titre du service de la dette d’un montant de 1,9 milliard de dollars américains, dont 1,7 milliard venant de l’Initiative renforcée en faveur des pays pauvres très endettés et 201,3 millions provenant de l’Initiative multilatérale d’allègement de la dette (IADM). En termes du poids de la dette, le stock global de la dette extérieure du Congo s’élevait fin 2004 (au moment du point de décision) à près de 9,2 milliards de dollars. Fin-décembre 2008, le stock de la dette était de 5,6 milliards de dollars. Après le point d’achèvement, le stock de la dette est passer à 2,4 milliards de dollars.
7 ans plus tard, qu’en est il ?
À cette période, le Gouvernement congolais et Monsieur Sassou Nguesso s’étaient engagés à réformer le système de gestion des investissements publics et à réformer le système des marchés publics, nécessaire pour améliorer la gouvernance, la concurrence et la transparence. Un nouveau code des marchés publics a même été adopté ainsi que ses textes d’application et des nouvelles structures de passation des marchés ont été installées, dont l’Agence de Régulation des Marchés Publics et la Direction de Contrôle des Marchés Publics.
7 ans plus tard, qu’en est il ?
Les autorités avaient aussi convenu qu’il était urgent de mettre l’accent sur la transparence et la bonne gouvernance, et de s’attaquer à la corruption, en particulier pour garantir l’utilisation appropriée de l’aide d’urgence obtenue au titre de l’initiative PPTE renforcée. Cette exigence était complétée par des conditions particulières ayant trait aux secteurs des ressources naturelles, où la mauvaise gouvernance et la corruption déjà jugées particulièrement préoccupantes.
7 ans plus tard, qu’en est il ?
Dans le secteur pétrolier, il s’est agit d’améliorer le système comptable et les contrôles internes de la Société Nationale de Pétrole du Congo SNPC, qui surveille le secteur pétrolier et les flux budgétaires pour le compte de l’État et commercialise quelque deux tiers de la part de l’État du pétrole congolais et environ 40 % des recettes pétrolières globales du pays. Il s’est également agit de réduire la possibilité de conflits d’intérêts pour les administrateurs et les cadres ayant un mandat de gestion au sein de la SNPC et de ses filiales.
7 ans plus tard, qu’en est il ?
Les autorités s’étaient aussi engagées à réformer et assainir profondément le secteur forestiers, celui des télécommunications, de l’éducation, de la santé et la gestion de la dette.
7 ans plus tard, qu’en est il ?
Marie Françoise Marie-Nelly, Directrice des Opérations de la Banque mondiale pour la République du Congo, déclarait en 2010 que atteindre le point d’achèvement est « une reconnaissance des progrès remarquables accomplis par les autorités congolaises dans la mise en œuvre d’importantes et difficiles réformes qui ont conduit à des améliorations significatives dans la gestion budgétaire et économique du pays. Nous exhortons les autorités congolaises à maintenir cette dynamique en utilisant ces revenus provenant de l’allégement de la dette pour rendre l’économie plus diversifiée et compétitive et pour améliorer les conditions sociales du peuple du Congo »
7 ans plus tard, qu’en est il ?
Force est aujourd’hui, de reconnaître que le FMI et la Banque mondiale ont été au travers de l’initiative PPTE, victimes d’une escroquerie à grande échelle imaginée par les autorités congolaises en complicité avec certains hauts cadres de ces institutions.
Force est aujourd’hui, de constater que la diet que s’étaient imposée les autorités congolaises entre 2004 et 2010 pour atteindre le point d’achèvement de l’initiative PPTE n’était en fait qu’un cheval de Troie.
Force est aujourd’hui, d’admettre que les promesses faites par Monsieur Sassou qui déclarait en 2010 que « Le Gouvernement congolais mettra tout en œuvre pour mener à terme toutes les réformes en cours, en vue de lutter efficacement contre la pauvreté et offrir au Congo la perspective d’un développement économique et social harmonieux », n’était en fait qu’un gros mensonge d’Etat destiné à duper des institutions financières telle que la vôtre dont le but est certes, de promouvoir la coopération monétaire internationale, garantir la stabilité financière, faciliter les échanges internationaux, mais aussi et surtout contribuer à un niveau élevé d’emploi, et faire reculer la pauvreté.
7 ans plus tard, qu’en est il ?
Les mêmes causes produisent les mêmes effets.
Il serait incompréhensible qu’une institution comme la vôtre s’engage à soutenir de nouveau, au détriment de tout un peuple, un système qui a brillé par son incompétence et son immoralité.
Il serait criminel qu’une institution comme la vôtre, octroie une aide à un pays qui foule officiellement les droits fondamentaux de ses citoyens au bénéfice d’une caste organisée en mafia tribale et tyrannique.
Il serait enfin totalement irresponsable qu’une institution comme la vôtre, accorde ne serait ce qu’une once de crédit à un système et des hommes qui ont délibérément cherché à vous duper en falsifiant des documents officiels pour camoufler une dette dont ils sont les seuls responsables.
Considérant les faits sus-cités et le désir profond du peuple congolais, comme démontré lors des dernières échéances électorales de rompre définitivement avec un système totalitaire et “libertophobe”, nous, membres de la société civile congolaise,
Un prêt octroyé par le FMI à ce gouvernement ne servira qu’à la corruption et l’achat des armes de guerre pour poursuivre l’oeuvre du maintien au pouvoir de Monsieur Denis SASSOU NGUESSO en place depuis 33 ans sans réussite aucune.
Madame la directrice, nous sommes déterminés à vous tenir pour responsable perpétuelle des crimes évidents que commettra ce gouvernement si ce prêt est octroyé sans des clauses de justice sociale, de transparence et de transition politique.
Considérant la situation économique du Congo comme résultant d’abord de la mauvaise gouvernance et de l’instabilité politique, nous proposons au FMI de compléter ses exigences par les conditions préalables suivantes :
- Libération sans conditions des prisonniers d’opinion;
- Ouverture d’une transition politique.
- Mise en place d’un audit pour le rapatriement des fonds détournés;
- Poursuite des auteurs des crimes financiers et économiques.
Madame la directrice, le peuple Congolais vous sera reconnaissant de votre diligence et vous soutiendra pour la réussite de cet objectif de redressement du Congo dans des conditions justes.
SIGNATAIRES
Pour des raisons de sécurité, nous avons choisi de ne pas citer les signataires vivant au Congo Brazzaville.
RESPONSABLES SOCIETE CIVILE
Alain Makaya (France)
Andréa Ngombet (France)
Anthyme Bayimina (France)
Arnaud Vouaza (France)
Blaise Mapingou (France)
Blaise Tchitembo (France)
Blaise Tsouary (France)
Cédric Batchi (France)
Gaylord Pouabou (France)
Georges Goma (Canada)
Harold Gatien Samba (France)
Isaac Senga Djoumali (France)
Justin Ngomo Ngomo (USA)
Marcus Kissa (France)
Martial Mbourangon (Burkina)
Miv Mivoutoukidi (France)
Nyongo Mbadinga (France)
Pascal Malanda (Belgique)
Sylvain Senda (France)
Roland Nitou (France)
Anicet Oliver Ngoma (Norvège)
Organisations
2C2RD
Brazza News
CDHD
Collectif Samu na buala
Collectif Sassoufit
Jeunesse Mokoko
COMPO J3M
Conseil Nord Américain
CRADIC
Jeunesse Républicaine et Citoyenne (JRC)
MCCD
Mouvement pour la Culture Citoyenne (MCC)
ORICE
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